Le plus souvent, la ménopause a peu de répercussions sur la capacité d’une personne à travailler, et les employeurs pourraient ne pas remarquer de changement. Toutefois, chez certaines personnes, la ménopause peut avoir des effets sur la santé, le rendement et la présence au travail. A l’heure où les langues se délient, il m’a semblé important de le relever. J’ai recueilli le témoignage de Nathalie, qui a vécu un véritable bouleversement.
Bonjour Nathalie, merci de prendre ce temps avec moi pour témoigner de ton expérience
Pour comprendre ton contexte, quel âge as-tu ?
50 ans tout juste.
Quel travail exerces-tu ?
Educatrice depuis 5 ans. Je travaille avec des enfants et des ados dans un foyer.
Comment la ménopause a-t-elle impacté ton quotidien ?
J’ai eu le moral dans les chaussettes. Cela a commencé en automne 2023. Au début, j’ai mis mon humeur sur le compte de l’automne. Puis, le temps a passé. J’ai eu d’autres symptômes : j’étais souvent sur les dents, avec des sautes d’humeur, ce qui n’est pas dans mes habitudes. C’était comme découvrir une autre personne. J’ai commencé à me poser des questions en début d’année 2024. Je suis allée voir ma gynécologue, qui ne m’a pas apporté de réponse. Finalement, je suis allée voir mon médecin traitant en juin. J’avais des moments vraiment down. Ce sont les bouffées de chaleur qui m’ont donné un indice. Je lui en ai parlé. Nous avons essayé des choses naturelles mais sans effet. Je viens de commencer un traitement à base d’hormones depuis hier. Moi qui pensais être soulagée de plus avoir mes règles, maintenant je regretterais presque de plus les avoir.
J’espère que pourras sentir rapidement une amélioration. Et à ton travail, comment tu as vécu ces changements ?
J’en ai parlé à mes collègues. Je sais qu’on tolère les variations d’humeur des ados parce qu’ils ont un chamboulement hormonal. J’ai la même chose. J’ai beau essayer de le contenir, c’est difficile. En parlant de ma situation, j’avais l’impression de faire une sortie de placard, de me justifier.
Quelles ont été les réactions ?
Les réactions ont été variables : les plus jeunes ne se sentent pas concernés. Avec une femme de mon âge, on a bien échangé. Un homme a juste fait des sourires en coin. J’ai eu l’impression que pour lui, c’était des excuses, et qu’il me prenait pour une hystérique.
Et avec le public avec qui tu travailles ?
Avec les jeunes et les enfants, je sens que je suis moins patiente, que je réagis de manière plus vive. Je me sens plus tendue.
Je dors mal et peu. Je suis moins reposée, plus sur les dents. Je me réveille pendant la nuit, mon sommeil est de mauvaise qualité. Je commence ma journée fatiguée, je me sens plus sensible, à fleur de peau.
Je ne me reconnais pas dans l’image que je peux donner en ce moment. Mettre des mots sur cette différence, en parler autour de moi m’a fait du bien.
Une amie m’a dit qu’elle faisait des crises d’angoisse, et cela peut m’arriver aussi. Des choses bizarres se passent au niveau du corps et de l’esprit. Je me sens « terne » dans mes comportements, moins dans la joie de vivre. C’est ça qui m’a interpelé en premier.
Je me suis arrêtée 3 mois pour burnout en 2023 à partir d’octobre. Je sais quand cet état, il y eu quelque chose qui est en lien avec ces chamboulements hormonaux. Je ne me reconnaissais. Je me disais : « mais qu’est-ce qui se passe ? » . J’ai subi une attaque physique par un ado en juillet 2023. J’ai commencé par mettre mon burnout sur le compte de cet événement qui m’a traumatisée. Mais je réalise maintenant que la ménopause s’est imbriquée là-dedans.
Je me suis vraiment sentie démunie quand c’est arrivé.
De quoi aurais-tu eu besoin pour mieux vivre cette transformation ?
De l’information. Si on en parlait plus, à tout âge, les gens seraient plus au courant, on pourrait en parler plus librement et on saurait mieux faire face.
De la bienveillance de la part des gens, au lieu des grands yeux et ou des sourires en coin. Ca culpabilise trop.
J’aimerais pouvoir en parler, me faire un peu porte-parole. On n’est pas coupables de ça, c’est pas choisi ni plaisant, pas pour embêter le monde. Les hormones dysfonctionnent, cela peut durer, c’est différent pour chacune.
Aujourd’hui je me sens mieux d’avoir pu mettre des mots sur ce qui m’arrive. J’arrive mieux à me réguler. Je me dis, « respire » pour laisser passer l’agitation.
Merci pour ton témoignage, Nathalie. Je partage ton point de vue, il est important de sensibiliser sur la question. A mon avis, il est grand temps que les organisations répondent aux préoccupations liées à la ménopause de façon respectueuse.
Le CHUV, premier employeur du canton de Vaud a commencé une réflexion sur le sujet. Une table ronde a été organisée le 26 mars 2024 sur ce thème, afin d’ouvrir le dialogue pour définir les mesures à prendre. Nous suivrons le retour qui en sera fait.
A l’ISQVT, nous travaillons en co-construction avec les organisations pour adresser tous les sujets en lien avec la santé du personnel, à tous les niveaux de la hiérarchie et nous savons que celui-ci peut faire des propositions efficaces, parfois même très simples à mettre en place. Et cette approche convient parfaitement sur un sujet comme celui que tu nous as partagé.
Sans oublier la sophrologie que j’exerce, et qui aide à mieux vivre les changements d’humeur liés à la chute des hormones.
Corinne Mahaut, Experte QVT, Sophrologue
corinne.mahaut@testclients.osez-percer.com
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